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Verdun, 90è anniv. Actualité 11 Nov. 2006 11 Novembre 2005 Ils ont dit L'auteur

 
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L'ouvrage référence sur les fusillés de la Grande Guerre Editeur
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HISTORIQUE

Cette rubrique a pour objectif d'expliquer pourquoi et comment les anciens combattants survivants de la Guerre 14-18 ont été recensés en France dès 1995. Nous introduirons la discussion par une brève comparaison avec les guerres passées (celles du Ier Empire et de 1870-71), verrons le rôle majeur du septennat du Président Chirac et l'action de l'ONAC engagée. Enfin nous nous interrogerons sur l'éventuel épilogue que constituerait l'organisation d'un hommage national pour l'enterrement du dernier "Poilu".

La Guerre de 14-18 et la disparition médiatisée de ses derniers combattants durant les années 2000 constitue une première en France. Jamais auparavant, un tel évènement n'avait pu être observé de façon aussi précise par un si grand nombre.
A titre de comparaison, on ne sait pas très bien quels furent les derniers combattants des guerres du Ier Empire et de 1870-71. Quelques cas isolés sont cependant connus comme, Louis-Victor BAILLOT (09-04-1793 / 03-02-1898, 104 ans), qui était considéré comme le dernier survivant de Waterloo [lien]. Cas exceptionnel que celui de Gerrit (Geert) ADRIAANS (21-09-1788 / 03-02-1899) : ancien combattant hollandais engagé dans l'armée napoléonienne, il fut tambour au 33ème Régiment Léger et mourut à l'âge de 110 ans (le premier supercentenaire connu).
Le mystère est encore plus grand quand on examine les anciens combattants de la Guerre de 1870-71. Les derniers soldats disparurent dans les années 1950 dans l'indifférence quasi générale ; au mieux étaient il des gloires locales. Les recherches que nous menons actuellement nous ont permis d'identifier un des tous derniers combattants décédé en 1955 (nous réservons la primeur de cette découverte à une publication prochaine).

Jusqu'en 1995 le nombre de survivants de la Grande Guerre n'est qu'estimé. Seuls les anciens combattants touchant une retraite (à ce titre) et les pensionnés (pour invalidité) sont connus et recensés. C'est l'ONAC (Office National des Anciens Combattants) qui accorde le statut d'ancien combattant. Sont "écartés" les anciens soldats qui n'en font pas la demande ainsi que ceux "n'ayant participés" qu'aux derniers jours de la guerre (trois mois de campagne étaient nécessaires, à moins d'avoir été décoré ou blessé ).
Le 24 août 1995 Monsieur Pasquini, un ancien combattant de 39-45 et Ministre délégué aux anciens combattants et aux victimes de guerre, prend, avec l'aval de Jacques Chirac, la décision d'accorder la Légion d'honneur aux Poilus survivants non encore décorés. Mais il ne reste que deux mois pour constituer les dossiers des futurs légionnaires (on souhaite les décorer lors des cérémonies du 11 Novembre 1995). C'est l'ONAC et le Ministère des Anciens Combattants qui vont être chargés d'établir la liste de tous les Poilus survivants et d'établir un dossier individuel pour chacun des vétérans selon la directive de la Chancellerie de la Légion d'honneur. Pour être promu il faut un casier vierge et ne pas avoir collaboré avec l'occupant entre 1940 et 1945 : 700 noms vont être rayés. Le Ministère pensait recenser tout au plus un millier de survivants : ils sont en fait cinq fois plus nombreux. Ce qui va bloquer dans la constitution des dossiers de nombreux Poilus, c'est la fiche d'état signalétique et des services. Cette fiche, demandée par la Chancellerie de la Légion d'honneur, atteste de l'affectation et des faits de guerre de l'intéressé : elle ne sera malheureusement pas toujours retournée à temps au Ministère des Anciens Combattants par les archives départementales, ce qui repoussera l'attribution de la Légion d'honneur pour un millier de Poilus. Incompréhension et amertume gagneront certains d'entre-eux.
Dans un décret de la Présidence de la République daté du 3 novembre 1995 (Journal Officiel du 4 novembre), 1352 hommes se voient ainsi nommés au grade de chevalier de la Légion d'honneur à titre d'ancien combattant de la Guerre 14-18. Un second décret du 06 février 1996 attribuera la Légion d'honneur aux 900 Poilus pour lesquels la constitution du dossier avait pris du retard.
Bien qu'un formidable travail de recensement ait été effectué à cette occasion, le nombre exact de survivants de la Grande Guerre au 03 novembre 1995 n'est pas connu avec certitude. Voici notre estimation détaillée :
- 2250 [ anciens combattants décorés de la L.H. par décrets des 03-11-1995 et 06-02-1996 ] ;
- 700 [ anciens combattants de 14-18 ne répondant pas aux directives de la Chancellerie de la L.H. ] ;
- ??? [ anciens combattants de 14-18 répondant aux critères de la LH, ayant fait une demande de L.H., décédés entre novembre 1995 et février 1996 ] ;
- ??? [ anciens combattants de 14-18 déjà décorés de la L.H. ; nous ne connaissons pas le chiffre, peut-être un millier] ;
- ??? [ anciens soldats de 14-18 ne s'étant pas encore fait recenser comme ancien combattant ou n'ayant pas déposés de demande de L.H.] ;
- ??? [ anciens soldats de 14-18 "n'ayant participé" qu'aux derniers jours de guerre, à priori des hommes nés en 1899-1900 ; nous n'avons aucune idée de ce chiffre ].
L'estimation communément admise fait état de 4000 Poilus (en réalité, peut-être un millier de plus).

Au début des années 2000, le nombre de Poilus s'étant considérablement réduit, les préfectures vont rechercher les Poilus non encore identifiés, afin de leur délivrer leur carte d'ancien combattant et leur verser la retraite de combattant. Sont concernés les Poilus qui ne s'étaient pas encore fait connaître auprès de l'ONAC (par choix ou par méconnaissance). Seront ainsi retrouvés plusieurs dizaines d'anciens combattants, comme par exemple Monsieur Léon Navarre, l'un des 12 derniers Poilus : il ne put remettre la main sur son livret militaire que fort tardivement, et ne recevra la Légion d'honneur qu'en 2004.

La question du décompte mérite également d'être évoquée. Sur les 4000 Poilus recensés en 1995-1996, connait-on le nombre exacte de ceux encore en vie aujourd'hui ? La redécouverte de deux Poilus "oubliés" en 2005-2006, messieurs Riffaud et Jaffré, permet d'en douter.

Autre élément important : il découle des critères sur lesquels la France se base pour accorder le statut d'ancien combattant de la Guerre 14-18 (3 mois de campagne, ou blessure au combat, ou acte de bravoure). Sont ainsi écartés des statistiques les "jeunes" générations de soldats (nés entre 1899 et 1901) totalisant peu ou pas de période de combat (beaucoup étaient encore en formation au moment de l'Armistice). Pourtant, la plupart des pays (anglo-saxons, italie,...) sont moins exigeants et incorporent dans leurs statistiques les soldats n'ayant pas ou peu combattus (les américains vont jusqu'à accorder ce statut aux militaires engagés dans les opérations de déminage d'après-guerre).
Sachant que ces plus "jeunes" générations constitueront probablement le dernier carré de survivants à travers le monde, la France sera peut-être amenée à modifier ses critères. Si tel était le cas, le nombre de vétérans français remonterait sensiblement (nous connaissons deux hommes rentrant déjà dans cette situation).

Depuis quelques années des voix s'élèvent, comme récemment celle de Monsieur Bernard-Marie Dupont (voir sa lettre adressée au Président Chirac dans Libération du 14-06-2005), pour réclamer un hommage national lors des funérailles du dernier Poilu. Le groupe socialiste de l'Assemblée Nationale, dans une proposition de Loi bientôt à débattre, propose même l'organisation de funérailles nationales en un lieu symbolique. Ce 18 Novembre 2005, à l'issue d'une réunion du Haut Conseil de la mémoire combattante, le Président Jacques Chirac a retenu le principe d'"obsèques solennelles de portée nationale".
Même si une telle cérémonie nationale semble maintenant acquise plusieurs questions se posent : le Poilu auquel on rendra hommage sera t'il bien le dernier ? Sa famille et lui-même accepteront-ils une telle cérémonie ?

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